Katari Films

Leo, un jeune réalisateur sans producteur, tente de mettre en scène une adaptation libre de La Mouette et des Trois Sœurs d’Anton Tchekhov. Mêlant trois strates scénaristiques, le tournage du film premier, le tournage du film second et son making of, Champ Libre raconte cette entreprise qui progressivement s’enlise mais ne sombre pas.

Champ Libre est intégralement construit sur l’enchâssement d’une double mise en abyme et est, de ce fait, un film profondément autoréflexif. Mais il serait réducteur de ne trouver dans ce jeu de poupées gigognes qu’une nouvelle variation sur un thème – le film dans le film – dont le cinéma moderne a déjà exploré les innombrables potentialités. Certes, les incidents de tournage et l’entremêlement d’amours, de vie privée et d’anecdotes de plateau font inévitablement songer à Fassbinder ou encore Truffaut. Mais Champ Libre n’est pas qu’une œuvre référentielle d’un réalisateur qui chercherait à décrire le cinéma qu’il aime en mettant en scène un tournage qui dysfonctionne. Ce film est surtout une œuvre hybride qui, hésitante entre théâtre filmé et éclats documentaires, entre huis-clos familial et symphonie urbaine de found-footage, démontre que le cinéma doit rester affaire de perpétuels essais et explorations. À cet égard, Champ Libre porte indéniablement les marques du processus de réalisation du collectif KATARI qui fait le pari, depuis 2013, de réaliser des long-métrages de fiction en-dehors de tous les clous du secteur. Pour autant, le film ne prône jamais ni n’enjolive la liberté du dénuement ou le manque de moyens à tout prix. Car si Champ Libre nous raconte un fiasco, c’est d’abord sans mépris aucun pour les formes dont, de toute évidence, il se distancie, joyeusement et radicalement.